C’est dans la nuit noire et obscure que le car nous débarque dans Thamel, le centre touristique de Katmandou. Il ne nous faut que 900 mètres pour rejoindre notre ancienne auberge de jeunesse.
La traversée d’un Katmandou désert fait froid dans le dos. On ne rencontrera que deux personnes qui nous proposeront de la marijuana. Apparemment le business continue !
Un petit détour et puis s’en vont
Une fois nos affaires récupérées, nous les déballons pour mieux les remballer. En effet on ne va pas rester dans cette auberge à la limite de l’hygiène. Un airbnb nous faisait de l’œil, et le contact avec les propriétaires s’était agréablement passé par téléphone. Ils nous attendent demain matin. Mais le tour n’est pas joué, car il faut y aller ! C’est à 5 km et nous sommes en confinement. On prend le pari de partir tôt et de passer exclusivement par les petites rues.
La mission de l’impossible
La partie de cache-cache se déroule sans encombres. De zig zag en zig zag, on marque des temps d’arrêts le temps de laisser passer le policier au loin. Mince un autre à droite ! Ce n’est pas grave on va passer par cette petite rue coupe gorge très sympathique. Devant nous se dresse un boulevard que nous devons absolument traverser. De chaque côté des policiers, nous sommes cernés!
Mais la chance est avec nous et à un moment tout le monde regarde à l’opposé. Nous en profitons pour traverser en courant. Je précise qu’à ce moment-là nous nous « baladons » avec plus de 20 kilos chacun !
En se rapprochant de l’arrivée, c’est tout un convoi de l’armée qui nous attend à un carrefour… Bon nous n’avons pas le choix, on marche droit dessus la tête haute. Qu’ils essaient un peu de nous arrêter et je leur tousse dessus ! Non ?! Rien du tout, même pas un regard. Du coup on finit notre chemin en prenant les grands axes et on débarque chez Lima et Sanzay pour le petit déjeuner.
Le Caesar palace
Ce jeune couple hollandais/népalais de 26 ans, nous accueille pour une semaine, le temps que ce confinement se termine. On est le 2 avril et vous vous doutez bien qu’on y est toujours aujourd’hui (1er Mai 2020).
Locataire d’un appartement de 35 m² avec terrasse, dans une maison, ils viennent juste de quitter le cocon familial. Il n’y a pas de salle commune, donc c’est soit on est dans notre chambre, soit sur la terrasse. Rapidement une organisation se met en place avec nos deux compères : courses communes et un fonctionnement en mode colocation.
Quand l’appétit va, tout va
Il n’y a pas à dire Sanzay fait vraiment des miracles en cuisine avec les légumes. La viande est quasi inexistante et lorsque l’on achète un poulet c’est un peu comme Noel ici. Les épices de toutes les couleurs agrémentent agréablement nos plats. Et après 50 nuances de riz, on passe à 50 nuances de pois !
Par contre un gros problème se pose rapidement. Nous n’avons plus de café moulu pour notre cafetière vietnamienne. Et bien devinez quoi ?! Le café, le vrai ça n’existe pas. Ici c’est le Nescafé instantanée au pouvoir ! Donc il est possible qu’on soit devenu tous les deux un peu grincheux à cause de ça.
Cuisinella
Le confinement se durcit et il n’est donc plus vraiment recommandé aux étrangers de sortir mise à part pour des courses de premières nécessitées. Nos deux logeurs nous annoncent donc que dorénavant c’est uniquement eux qui feront les courses quotidiennes. Oui tous les jours, car nous n’avons pas de frigo ici. Quoi ça vous choque ? Et si je rajoute qu’on a aussi qu’une seule plaque électrique ? Et pas de bouilloire non plus ? Eh bien on s’en sort très bien. Par contre il ne faut pas être pressé le matin pour se faire un petit déjeuner. Le plus important reste de ne pas oublier de faire bouillir le lait la veille, car la version yaourt au réveil n’est pas top.
Le système D
Viens ensuite la vaisselle : un bac, une éponge et une sortie d’eau. Le tout assis par terre sur la terrasse. Et comme tout est à multiple usage au Népal, ce même bac sert aussi pour laver nos affaires. Le lave-linge d’antan avec la fonction nettoyage intensif à coup de pied. C’est comme si je faisais partie de l’équipe de récolte de Dionysos.
La gagne !
Nos soirées sont rythmées par des parties endiablées de cartes avec Lima et Sanzay. Le mot est bien choisi. Je n’ai jamais vu une aussi mauvaise joueuse, excepté mon frère avec le Monopoly (jeu maintenant interdit dans la famille). Ils nous ont appris à jouer au poker népalais et au Bawling, une sorte d’Uno avec des cartes normales. Nous avons donc décidé de sortir notre fameux UNO Flip de la Malaisie. C’est une nouvelle version avec un côté interchangeable. Je vous ferais découvrir cette édition contre une bonne bière et du saucisson.
Disons qu’elle n’a pas beaucoup gagné et qu’elle est vite devenue une super rageuse. Mais pour autant elle veut y jouer le plus souvent possible. Heureusement la bonne humeur est toujours au rendez-vous. A un moment j’ai tellement gagné à la suite que je me suis demandée si elle n’allait pas nous foutre dehors. Du coup j’ai fait exprès de perdre… Mon égo et moi nous n’avons pas aimé ! Nous passons de très agréables soirées tous ensemble.
Big Brothers
Mais la relation avec nos voisins c’est une autre histoire. Dans la même bâtisse, il y a le propriétaire principal et nous avons le droit à sa visite quotidienne : vérification de la cuve d’eau et balayage de notre terrasse. On se sent épié mais je pense que cette personne a juste des habitudes et il en profite surtout pour venir fumer sa clope loin de sa bonne femme. Sa femme elle, arrive avec ses tapis et s’installe sur notre terrasse pour faire son grand nettoyage. Ce qui est assez étrange car ils ont eux aussi une cours et une terrasse. Mais bon la vue doit être mieux d’ici.
Comme vous le voyez, on s’occupe comme on peut. Certains gognent, d’autres dessine, d’autres encore se renseignent sur la fabrication de la bière. Nous menons notre petite vie tranquillement. Mais c’était sans compter sur le propriétaire de l’immeuble!
Inspecteur gadget
Le voici qui débarque une nouvelle fois en nous demandant nos papiers pour le gouvernement. Mais que ce passe t’il ?! En plus comment le gouvernement sait que nous sommes ici ? Nous ne sommes finalement pas passé officiellement par Airbnb… Bref encore un mystère de la vie. On lui envoie une copie de nos passeports et visa par mail. Que va nous réserver la suite ?
Trois jours plus tard, le retour du propriétaire à 11 h 15! Il faut que nous allions nous faire dépister pour le Covid. Il ne manquait plus que ça. Nous n’avons pas du tout envie d’aller dans un endroit rempli de pseudo malades. De même quels sombres tests vont ils nous faire subir? Après beaucoup d’argumentation, nous n’avons pas le choix. Sanzay nous accompagne (ce couple est vraiment adorable) jusqu’au lieu indiqué. Il s’agit d’une cour d’école où se mêlent des militaires, des agents de la municipalité, des infirmières.
La consultation
- La salle d’attente : la cour de l’école avec des chaises espacées de 2m.
- La musique d’ambiance : la marche des militaires devant nous.
- La première salle toujours en extérieur : une table de ping pong en béton pour bureau où on prend mon prénom, mon age et mon dernier pays.
- L’ infirmière : prenez une madame Patate, mettez lui des gants, un masque et une blouse. Puis rajoutez lui une combinaison de bricolage, une charlotte, et une seconde paire de gant. Enfin coiffez la d’une visière en plastique.
- La salle de soin: Deux « infirmières » qui nous attendent avides de notre sang. On nous prélève une goutte de sang sur le doigt et puis hop sur un petit test et dans 15 min on a le résultat. Ce sont des minutes népalaises donc on va plutôt dire 1 h d’attente.
Le coup de gueule
Parce-que bien sûr faire quelque chose sans râler n’est pas français!
Lorsque c’est mon tour de me faire piquer, j’exige que l’infirmière change de gants. Elle enchaîne les patients mais sans les changer. Si elle veut me faire cette « prise de sang », l’hygiène doit être au top. Donc elle demande à ce qu’on lui mette de la solution hydroalcoolique sur ces gants pour les « désinfecter ». Non mais vous y croyez?! Je suis têtue et je maintiens ma position. Finalement elle change de gants et l’opération se passe sans encombre. En tout cas pour moi.
Car Benjamin passe juste derrière moi et lui ce sera une nouvelle paire de manches. Elle ne change pas de gant malgré sa demande. L’infirmière le pique 3 fois sur le bout du doigt. En découle beaucoup de sang au bout d’un moment et lorsque Benjamin s’en va, il la voit avec ses gants pleins de sang, se les nettoyer au gel hydroalcoolique mais sans les changer. La sécurité hygiénique avant tout … Covid ou HIV etc… vive la loterie ici!
Voilà on s’arrête là pour cette première partie de Katmandou, mais d’autres aventures arrivent bientôt.